Soeurs de Saint Joseph d'Annecy

Rêves et Réalités Vie en Paroisse-Angleterre

 

A mon retour à la Province d’Angleterre, après mon mandat de Secrétaire Générale, je rêvais d’avoir davantage de temps pour prier et pour écrire – du temps pour ETRE. C’était un beau rêve mais pas la réalité car je me suis rapidement trouvée immergée dans la vie d’une paroisse et de ses multiples problèmes.

Il y aura bientôt 5 ans, j’ai été envoyée avec Sr Maureen Davis à la paroisse du Saint Sacrement, Rumney, Cardiff, paroisse sans prêtre après le décès du curé en charge. Sr Maureen a poursuivi son travail en temps que Responsable du Centre Pastoral Diocésain. Quant à moi j’ai été chargée de cette Paroisse. Nous suivions les offices de la paroisse voisine, St Jean Lloyd, distante à un peu plus de 2 kms.

 

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Le presbytère du Saint Sacrement, avait été remis à neuf avant notre arrivée mais rien ou très peu avait été fait au niveau de l’église, ces 30 dernières années. Elle avait un besoin urgent de réparations causées en particulier par des gouttières. Chaises, bancs etc. linge d’autel étaient en très mauvais état à cause de l’humidité. La première chose fut de mettre en place un Groupe d’Action Paroissiale pour partager les nombreuses tâches à entreprendre : planning, nettoyage, collecte de fonds etc. en d’autres mots assumer les responsabilités.

De toute l’Europe, la paroisse accueille le nombre le plus important de voyageurs. Elle peut offrir le gite à environ 2 000 personnes qui considèrent « The Blessed Sacrement » comme leur paroisse. Parmi eux, les Irlandais, grands voyageurs, qui gardent l’ensemble de leurs traditions. La plupart vivent en Irlande mais aussi dans d’importantes communautés au Royaume Uni et aux Etats Unis. Sur la paroisse, se trouve également une assez grande communauté d’Indiens, la plupart du Kérala ; mais aussi des Philippins, des Africains, des Polonais et des Italiens, tous très bien intégrés. Les paroissiens sont très généreux et travaillent avec « Le Groupe d’Action » pour l’animation Avec eux, nous avons mis sur pied divers moyens pour lever des fonds (très nécessaires) pour développer et                               animer la vie de la Communauté, partager joies et épreuves. Une première action pour obtenir de l’argent : une marche d’environ 2 kms pour tous, y compris les personnes avec leur déambulateur ou leur canne, etc. Moi-même, j’ai parcouru le trajet, déguisé en « bonne » sorcière, à califourchon sur un manche à balai.

L’église maintenant n’a plus de gouttières ; repeinte à l’extérieur et à l’intérieur, elle présente un aspect accueillant et soigné. Grâce à la générosité de la Province, le linge d’église, les nappes ont été remplacés. L’église est maintenant un lieu digne pour l'adoration. Toujours grâce à nos sœurs, nous avons maintenant toute une collection de statues de jardin spéciales pour Pâque. Nous sommes loin de la première fête de Pâque, lorsque nous collions des symboles de la fête, sur du plâtre en décomposition, pour illustrer la joie de Pâque.

Parfois, quand je me reporte à ces débuts, je me sens être, tour à tour, un responsable des travaux, un expert en échafaudage, un bûcheron, un peintre, un décorateur. En réalité, j’étais bien davantage que tout cela. Le bâtiment-église est seulement un chemin pour une réalité plus haute : partage de l’Amour de Dieu avec toute personne rencontrée, un lieu pour approfondir la vie de prière.

Deux évènements particuliers rythment l’année : les chants de l’avent aux chandelles et, chaque premier vendredi du mois, l’Eucharistie suivie de l’Exposition du Saint Sacrement. Ce temps de prière se termine par un léger repas. Au début, les chants de l’Avent rassemblaient peu de monde, actuellement une centaine de personnes dont le chœur de l’école primaire de la paroisse St Jean Lloyd ; ce qui crée des liens solides entre la paroisse, l’école et les familles.

L’été dernier, nous avons eu la joie d’assister à l’ordination d’un paroissien. Pour la cérémonie, la cathédrale était pleine de monde et également le jour suivant pour la première Messe. Occasion unique pour vivre ce qu’il y a de meilleur en nous et souvenir que nous sommes déterminés à conserver longtemps.

Une catéchèse sur les sacrements réunit notre paroisse à celle de St Jean Lloyd ; ce qui a permis aux laïcs d’avoir assez de confiance en eux-mêmes pour partager leur foi. Les catéchistes des deux paroisses commencent à prendre des responsabilités. Notre groupe de base est devenu un soutien pour le programme du RCIA, Initiation des adultes aux rites chrétiens. Dernièrement, il s’est transformé en un groupe d’échange de la foi et d’évangélisation. Nous avons formé plusieurs paroissiens pour porter l’Eucharistie aux malades et aux personnes confinées dans leur maison. Maintenant ils ont pris en charge ce ministère. La semence a été jetée et nous espérons que l’Esprit saint féconde chaque petite graine et fasse grandir la foi.engl2

Moi-même, ces deux ou trois dernières années, j’ai suivi la formation pour la conduite des funérailles, réalité toute nouvelle dans le diocèse. Ministère privilégié pendant les deuils où les personnes rencontrées sont très vulnérables et réceptives. C’est pour moi une tristesse de constater que, malgré la foi pratiquante de la personne décédée, la génération suivante ne pratique plus et a peu de connaissance sur la notion chrétienne de la mort. C’est un véritable défi de les rejoindre avec notre foi, car pour beaucoup d’entre eux, c’est une des rares occasions d’un contact avec la religion.

La présence d’une importante communauté itinérante demande aussi beaucoup d’investissement. Leur compréhension de la foi et leur pratique différent beaucoup de la nôtre. Nous ayons réussi à initier les jeunes aux programmes de la Confirmation et de la première communion. Les parents eux-aussi suivent la préparation au baptême. Comme beaucoup sont analphabètes, nous n’utilisons pas de textes écrits, mais des DVD qui permettent des échanges. Nous vivons parfois des situations homériques à l’occasion de mariages ou des funérailles. Il arrive que des groupes rivaux se battent. Nous avons vécu une sépulture mémorable lors d’une rixe, qui a fait la UNE des journaux nationaux : la police a dû intervenir et l’hélicoptère survoler le cimetière pour maintenir l’ordre.

D’une façon ou d’une autre, j’ai été impliquée dans l’éducation pendant de nombreuses années. J’ai toujours aimé le contact avec les enfants et les éducateurs quand j’étais directrice de l’école St Jean. J’ai contribué à promouvoir l’esprit de l’école catholique. Ce me fut une grande joie quand, récemment, l’école St Jean a été inspectée et félicitée.

Mon rôle est aussi de renforcer les liens entre l’église et l’école, de soutenir l’équipe enseignante ;c e qui m’a permis de mieux connaître les familles.

Que reste-t-il de mon rêve ? Il s’est transformé avec la réalité de la vie. J’ai eu le privilège de travailler avec et pour beaucoup de personnes merveilleuses. Elles m’ont partagé leur vie et j’ai partagé avec elles les richesses de notre charisme, dans les moments heureux et plus difficiles. J’ai essayé de donner mais j’ai reçu, en retour, bien davantage. J’aime ce que je fais. C’est parfois difficile et exigeant mais n’est-ce pas ce que sont les rêves, eux aussi ?

« Nous allons de préférence vers les pauvres et les plus délaissés. Nous cherchons à susciter des apôtres capables de répandre le message de l’évangile : que tous sont appelés au plus grand Amour. »

Ce serait merveilleux d’entendre le témoignage d’autres Sœurs de St Joseph.

Sœur Marie de Montford

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